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Photo du rédacteurBernard Vivier

L'histoire des retraites : les grandes dates : 2- La généralisation

Après l'ère de la conquête, vient le temps de la généralisation des retraites en France : régime général de la Sécurité sociale en 1945, retraites complémentaires en 1947 et 1961. Notre pays se dote d'un système généreux. En 1982, une ordonnance établit la retraite à 60 ans.

1945. Dans le droit fil du programme du Conseil national de la Résistance, l’ordonnance du 4 octobre 1945 crée la Sécurité sociale. Elle instaure notamment un régime d’assurance vieillesse fonctionnant par répartition.

- La Sécurité sociale -

L’âge de la retraite est établi à 60 ans. Les salariés ayant cotisé au moins trente ans (soit 120 trimestres) peuvent percevoir une pension égale à 20% du salaire annuel moyen des dix dernières années. S’ils demandent la liquidation de leur pension après 60 ans, celle-ci est majorée de 4% du salaire annuel de base par année. A 65 ans, la retraite est donc de 40% du salaire. L’âge d’une retraite considérée à taux normal (40% du salaire de base) est bien établi à 65 ans.


En cas de décès de l’assuré après 60 ans, une pension de reversion est attribuée au conjoint à charge (c’est-à-dire sans revenu) qui est âgé d’au moins 65 ans. Cette pension de reversion est égale à 50% de la pension du défunt.


Ce dispositif se veut universel. En fait, les fonctionnaires et les régimes spéciaux (SNCF, EDF-GDF, Charbonnages de France, etc.) obtiennent le droit de conserver leur existence, financièrement plus avantageuse. En outre, les agriculteurs disposent d’un régime à part : la Mutualité sociale agricole. Enfin, les non-salariés organisent leurs propres régimes de retraites, à partir de 1948 : CANCAVA pour les artisans, ORGANIC pour les commerçants et industriels, CNAVPL pour les professions libérales.


Le système créé en 1945 n’est donc pas unique ni vraiment universel. Bien que plus favorable que le système de 1928-1930 et que celui de 1941, le « régime général » de la Sécurité sociale comporte des imperfections : la tranche de salaire dépassant le plafond n’ouvre pas droit à pension ; les carrières accomplies avant 1930 ne génèrent pas de droits ; le taux de liquidation entre 20% et 40% ne génère pas une pension suffisante.

- Les retraites complémentaires -

1947. Les partenaires sociaux s’efforcent de remédier à la situation. Le 14 mars 1947, patronat et syndicats signent une convention collective créant l’Association générale des institutions de retraite des cadres, l’AGIRC.

1948. La loi du 20 septembre 1948 aménage les règles applicables aux fonctionnaires de l’Etat. Elle établit que la pension correspond à 2% du traitement indiciaire des six derniers mois par annuités liquidées dans la limite de 37,5 annuités soit 75%.

1953. Grèves des fonctionnaires et des agents des services publics contre les décrets-loi Laniel qui réduisent les avantages de ces salariés en matière de retraite. Ces grèves, nourries par la CGT et le Parti communiste, prennent une tournure insurrectionnelle.

1956. La loi du 30 juin 1956 crée le Fonds national de solidarité alimenté par la vignette automobile. L’objectif est d’assurer un minimum de retraite aux salariés de plus de 65 ans qui n’ont pas acquis de droits propres à la retraite ou dont les cotisations ne permettent pas d’atteindre un montant minimum de pension.

1961. Pour les retraites complémentaires des non-cadres, la démarche est plus longue que pour les cadres. Après une première tentative de régime unique avec l’UNIRS en 1957, l’accord du 8 décembre 1961 crée l’Association des régimes de retraite complémentaire, l’ARRCO.

Une loi du 29 décembre 1972 généralise le régime AGIRC et les régimes ARRCO à l’ensemble des salariés.



1964. Le Code des pensions civiles et militaires de retraite regroupe les réglementations précédentes et devient le texte de base des pensions de l’Etat.

1967. L’Etat n’ayant pas accordé de régime de retraite complémentaire pour les fonctionnaires, quatre organisations syndicales (CFDT, CFTC, FO, CGC) créent la PRÉFON, système de retraite complémentaire par capitalisation. Les versements sont transformés en points ; la sortie du régime se fait uniquement en rente, entre 55 ans et 78 ans, sans lien avec le départ en retraite. Des avantages fiscaux rendent le système attractif.

Il est à noter l’existence d’un autre régime de retraite complémentaire, à adhésion facultative et individuelle, qui fonctionne sur le principe de la capitalisation : le Complément de retraite mutualiste (COREM). Créé en 2002, le COREM a succédé au Complément retraite de la fonction publique (CREF), lui-même créé en 1987 par le regroupement de différentes mutuelles de fonctionnaires, notamment la MRIFEN (Education nationale) la Mutuelle des PTT et la MGEN.

1971. La loi du 31 décembre 1971, dite loi Boulin (alors ministre de la Santé publique et de la Sécurité sociale), modifie le taux de liquidation à 60 ans, qui passe de 20% à 25% du salaire annuel moyen, avec majoration de 5% au lieu de 4% par année après 60 ans, pour atteindre ainsi 50% à 65 ans. Par ailleurs, le nombre d’années de travail pour avoir une pleine retraite passe de 30 ans à 37,5 ans (120 à 150 trimestres).

Publié en 2008 (ESF éditeur, 96 pages) ce livre situe les régimes spéciaux dans leur histoire et aide à comprendre la spécificité française.

1971. Les pensions de reversion sont améliorées. En 1971, une condition de ressources est substituée à la notion de conjoint à charge. Le 11 décembre 1972, l’accès à une pension de reversion est fixé à 55 ans au lieu de 65 ans.



En 1975, il devient possible de cumuler, dans certaines limites, une pension de reversion et une retraite personnelle.

1972. Le décret du 11 décembre 1972 calcule la pension sur la base des dix meilleures années et non plus des dix dernières.

1975. La loi du 3 novembre 1975 supprime la durée minimum d’assurance pour avoir droit à une pension : un trimestre de cotisation suffit. En outre, la durée d’assurance est majorée de deux ans par enfant.

La loi du 30 décembre 1975 permet à des travailleurs manuels ayant exercé des travaux pénibles d’obtenir une pension à taux plein dès 60 ans. Il en est de même pour les assurées mères de famille.

1977. La loi du 1er juillet 1977 accorde aux femmes ayant cotisé 150 trimestres le bénéfice de la pension à taux plein (50% du salaire) dès l’âge de 60 ans.

- La retraite à 60 ans -

1982. L’arrivée au pouvoir de François Mitterrand, le 10 mai 1981, s’effectue sur la base des « 110 propositions » du candidat socialiste à l’élection présidentielle. La proposition n° 82 indique que « le droit à la retraite à taux plein sera ouvert aux hommes à partir de 60 ans et aux femmes à partir de 55 ans ». Il s’agit d’une reprise du « Programme commun de gouvernement » signé le 27 juin 1972 par le PCF et le PS.

Par une ordonnance (mesure qui dispense de tout débat parlementaire), Pierre Mauroy, Premier ministre, instaure au 1er avril 1983 la retraite à taux plein à 60 ans (au lieu de 65 ans) pour les hommes et pour les femmes (la mesure visant à leur accorder la retraite à 55 ans n’est pas concrétisée). La condition est d’avoir validé 150 trimestres, soit 37,5 années de cotisation. La pension est de 50% du salaire annuel moyen des dix meilleures années. Ceux qui partiront à 60 ans sans avoir leurs 150 trimestres verront leur pension minorée, la retraite à taux plein étant garantie à 65 ans

Cet ouvrage publié en 2009 établit de façon claire et synthétique un tour d’horizon des problématiques qui expliquent les réformes entreprises.

1983. L’ordonnance du 26 mars 1982 établissant la retraite à 60 ans à compter du 1er avril 1983 ne peut prendre son plein effet que si les régimes de retraite complémentaires s’alignent sur le régime général.

Les partenaires sociaux, gestionnaires des retraites complémentaires, signent le 4 février 1983 un accord créant une Association pour la gestion de la structure financière (ASF), alimentée essentiellement par des fonds publics. Objectif : assurer le surcoût, pour les régimes ARRCO et AGIRC, des retraites versées à taux plein entre 60 et 65 ans. Cette garantie de retraite s’ajoute aux 50% du régime général et permet aux retraités de percevoir 20% supplémentaires du salaire annuel moyen.

Le dispositif de l’ASF a fait l’objet de reconductions successives.

1986. A partir de décembre 1986, le versement des pensions se fait à la fin de chaque mois et non plus à la fin de chaque trimestre (terme échu). Appliquée aux pensions du régime général, la mesure est progressivement étendue à tous les autres régimes de sécurité sociale. Dans les régimes complémentaires ARRCO et AGIRC, la pension étant versée d’avance en début de trimestre, aucun changement n’est opéré.

Le milieu des années 1980 marque probablement l’apogée du système. Avec les évolutions démographiques et les difficultés économiques, vient alors le temps du repli.

La retraite à 60 ans ou à 65 ans ? Dans notre pays, l’âge légal de départ en retraite a souvent oscillé entre 60 ans et 65 ans. La loi de 1910 fixe l’âge à 65 ans. En 1912, l’âge est abaissé à 60 ans. Mais le système fonctionne mal et ne survit pas à la Première guerre mondiale. La loi de 1928 permet de prendre sa retraite à taux plein à l’âge de 65 ans. L’ordonnance de 1945 créant la Sécurité sociale indique l’âge de 60 ans mais organise des conditions qui fixent l’âge effectif à 65 ans. L’ordonnance de 1982 fixe l’âge légal de départ en retraite à taux plein à 60 ans. La loi de 2010 relève l’âge d’ouverture des droits à 62 ans et l’âge du taux plein de 65 à 67 ans.

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