Nathalie Arthaud a remplacé Arlette Laguiller comme porte-parole de Lutte ouvrière. Cette organisation politique, probablement la plus étanche des trois grandes composantes du mouvement trotskyste en France (on ne connait ni son adresse ni le nom de ses dirigeants), se montre très active sur le terrain des questions sociales. A la CGT, son influence est forte.
1- Création
L’Union communiste, qui est le nom du parti dont le journal s’appelle Lutte Ouvrière, est le plus ancien mouvement trotskiste français. Créé en 1938 (du vivant de Léon Trotski) par le militant roumain Davis Korner, connu sous le pseudonyme de Barta, l’UC a refusé de rejoindre la IVème Internationale, survivant dans la clandestinité durant la seconde guerre mondiale avant de se reformer en 1945. Implanté dans l’usine Renault de Boulogne Billancourt, l’UC est à l’origine de la grande grève des ouvriers de l’automobile de 1947 qui conduit à l’éviction des ministres communistes du gouvernement. Le groupe tombe alors en sommeil, pour émerger de nouveau en 1956 sous le vocable de Voix ouvrière, à partir d’un noyau d’anciens militants auquel Barta refuse de se joindre et dont Robert Barcia, alias Hardy, prend la tête. Celui-ci recrute en 1968 Arlette Laguiller, jeune employée de banque syndiquée à la CGT puis à FO, dont il fait la porte-parole du mouvement pendant 50 ans. En 2007, Nathalie Arthaud lui succède, tandis que la succession de Hardy s’opère, toujours dans la clandestinité : la mort de son dirigeant sera cachée par Lutte Ouvrière pendant un an. L’identité de son successeur reste inconnue.
2- Structures
Lutte ouvrière : BP 233 - 75865 PARIS CEDEX 18 L’Union communiste est propriétaire du château de Presles, dans le Val d’Oise, où est organisée la fête annuelle de Lutte ouvrière depuis 1971, le week-end de la Pentecôte
La traditionnelle fête de Lutte ouvrière, à Presles
http://www.lutte-ouvriere.org contact@lutte-ouvriere.org On notera l’absence - volontaire - de toute information sur l’adresse géographique du siège du parti.
3- Tendances internes
L’UC accepte en son sein le droit de tendance, mais la minorité réunie autour de la fraction « l’Etincelle » a fait l’objet d’une purge en 2008 pour avoir critiqué la ligne politique du parti et suggéré une alliance électorale avec le Nouveau Parti Anticapitaliste. Elle se perpétue sous le titre de Convergence révolutionnaire au sein du NPA. Précédemment, L’UC avait procédé à des exclusions répétées contre ses opposants internes : en 1973 avec la tendance Révolution Internationale, en 1974 avec les partisans de l’Union Ouvrière, en 1975 avec le groupe Combat Communiste. Philippe Poutou, candidat du NPA à l’élection présidentielle de 2012 et délégué CGT chez Ford, est un ancien militant de Lutte Ouvrière exclu au milieu des années 70.
4- Porte-parole, figure de proue, autres personnalités
Nathalie Arthaud, professeur d’économie au lycée Le Corbusier à Aubervilliers, conseiller municipal de Vaulx en Velin ;
Nathalie Arthaud et Arlette Laguiller
Arlette Laguiller, retraitée, syndicaliste à la CGT puis à FO, sept fois candidate à la présidence de la République.
Robert Barcia (1928-2009), dirigeant d’entreprise (il a créé et dirigé deux sociétés de prestation de service et de formation de visiteurs médicaux), dirigeant politique de l’Union communiste à partir de 1956 jusqu’au début des années 2000.
Marc Peschanski, biologiste et neurophysiologiste, pionnier français des recherches sur le clonage cellulaire, créateur du Génopole d’Evry, militant de Lutte Ouvrière et soutien à la candidature de Nathalie Artaud en 2012.
Jean-Pierre Mercier, ouvrier chez PSA Aulnay, délégué syndical CGT, conseiller municipal de Bagnolet et porte-parole régional Ile-de-France de la candidate Nathalie Arthaud lors de la campagne pour l’élection présidentielle de 2012.
Lutte ouvrière dispose de 79 élus municipaux depuis 2008, notamment à Marseille, Dunkerque, Vénissieux, Bourges et dans plusieurs communes de la région parisienne.
5- Direction
Mouvement révolutionnaire, Lutte ouvrière continue d’avoir une organisation interne étanche vis-à-vis de l’extérieur pour échapper à d’éventuelles menées contre-révolutionnaires. Le parti est structuré en cellules ou cercles locaux, le plus souvent à l’échelle d’une entreprise.
Le congrès de Lutte ouvrière élit chaque année un Comité central, qui désigne en son sein un Comité exécutif. Les seules fonctions « publiques » sont celles de porte-parole régional et national. La porte-parole national de Lutte ouvrière est Nathalie Arthaud.
6- Nombre d’adhérents revendiqués
Les effectifs de Lutte ouvrière sont estimés entre 6000 et 8000 membres, dont un millier de militants électeurs au congrès. Le cursus d’intégration à Lutte ouvrière est long et complexe. Il exige une formation qui peut durer plusieurs années.
7- Organe d’information
Lutte ouvrière (hebdomadaire), c/o éditions d’Avron, 6 rue Florian, 93500 Pantin (Tel : 01.48.10.86.20).
Lutte des classes (mensuel).
Les exposés du cercle Léon Trotski (bimestriel).
Les « bulletins d’entreprise » ou « feuilles de boite » constituent une presse d’entreprise diffusée tous les quinze jours aux portes d’une centaine d’entreprises françaises. Ils sont rédigés par la cellule locale et comportent un éditorial national au recto et une série de brèves sur la vie de l’entreprise au verso.
8- Affiliation internationale
L’Union communiste est affiliée à l’Union communiste internationaliste, un regroupement de partis trotskistes issus d’une demi-douzaine de pays ou zones géographiques : Afrique, Antilles, Haïti, Turquie, Espagne, Italie, Grande-Bretagne...
A la différence des autres mouvements trotskistes, l’Union communiste n’adhère à aucune Internationale, mais travaille à créer une force prolétarienne internationale.
9- Positionnement politique
Lutte ouvrière est un mouvement résolument tourné vers la classe ouvrière, seule force à ses yeux possédant un potentiel révolutionnaire.
Fidèle aux analyses de Marx, Engels, Lénine, Rosa Luxembourg et Léon Trotski, Lutte ouvrière œuvre à organiser le prolétariat en un mouvement d’auto-émancipation. A ce titre, son action politique est centrée sur l’entreprise, bien que de nombreux militants soient fonctionnaires, comme Nathalie Arthaud, enseignante.
Les propositions de Lutte ouvrière en direction du monde du travail portent sur l’interdiction des licenciements, le relèvement immédiat des salaires, la suppression des contrats précaires, la fin de toute forme de subvention publique aux entreprises et l’imposition des bénéfices à 50%. Lutte ouvrière milite aussi pour l’extension des services publics, le féminisme (droit à l’avortement), les droits des homosexuels, le logement social et la cause des sans-papiers.
Une des particularités de Lutte ouvrière est sa participation aux élections locales, nationales et européennes. Nathalie Arthaud a obtenu un peu plus de 200.000 voix et 0,56% des suffrages à l’élection présidentielle d’avril 2012. Le parti avait présenté 171 candidats aux élections législatives de 1973 (2,29% des suffrages) et en présentait 552 en 2012 (l’ensemble des candidats d’extrême gauche a totalisé au 1er tour 0,98% des suffrages). Cependant, les élections ne constituent qu’une caisse de résonance, Lutte ouvrière affirmant par ailleurs que la transformation de la société ne pourra venir que d’un processus révolutionnaire.
10- Positionnement sur les questions sociales, relations avec les syndicats
Les thèmes sociaux et salariaux composent l’essentiel des prises de position de Lutte ouvrière : augmentation des salaires, défense des salariés précaires, lutte contre les licenciements, contrôle ouvrier des entreprises, retraite à 60 ans pour tous...
Ces thèmes sont exprimés dans les entreprises par les militants de Lutte ouvrière de façon à mobiliser les salariés et orienter leurs combats vers une dimension ouvertement « lutte des classes ». L’opposition à la hiérarchie, à la direction et au patronat est recherchée pour le potentiel révolutionnaire qu’elle révèle. C’est pourquoi les militants de Lutte ouvrière sont invités à occuper des postes de représentants élus, en particulier de délégués du personnel ou de membres du CE, pour dénoncer systématiquement l’exploitation capitaliste dans ces instances.
La CGT est l’organisation syndicale la plus concernée par l’influence de Lutte ouvrière. Profitant du relâchement des liens du syndicat avec le Parti communiste, Lutte ouvrière y installe ses militants à des postes de délégués syndicaux afin de raviver l’idéologie communiste au sein des équipes syndicales. Une fois réalisé le noyautage de la section syndicale d’entreprise, un ou plusieurs militants révèlent leur appartenance à Lutte ouvrière, souvent à l’occasion de la distribution de la « feuille de boite » ou lors d’élections politiques où ils figurent comme candidats.
L’action syndicale de Lutte ouvrière consiste d’abord à soutenir les salariés dans leurs diverses revendications, pour rendre légitime à leurs yeux le rôle politique du parti. Il s’agit ensuite d’affronter la hiérarchie sur tous les sujets pour imposer un « contrôle ouvrier » sur toutes les décisions, par le moyen de la mobilisation et de la grève. Il convient enfin d’élargir le « front des luttes » pour précipiter un mouvement de protestation de masse auquel le parti donnera une orientation révolutionnaire.
« C’est pourquoi, même si, selon les circonstances et au fil des tribulations infligées par les bureaucrates, les révolutionnaires sont amenés à militer dans tous les syndicats, c’est dans les rangs de la CGT que leur travail pour « renforcer et accroître l’esprit de lutte » des syndicats est le plus important. »(extrait de « Les syndicats hier et aujourd’hui », exposé du Cercle Léon Trotski du 15 octobre 2010)
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