Dix pays rejoignent l'Union européenne, forte désormais de 25 adhérents. L'Europe, dit-on, retrouve son unité. Dans « Le Siècle de Louis XIV », Voltaire analysait déjà la question.
L’Europeretrouveson unité. Souvent entendue ces jours-ci, la formule peut surprendre de prime abord, car jamais l’Europe n’a été unie au sens strict du terme, parce qu’un coup d’œil sur son histoire nous la montre divisée en Etats, déchirées de conflits, ravagée par des guerres, mais ces guerres (qui furent longtemps des guerres entre les princes et non entre les peuples) n’empêchaient pas que ces Etats querelleurs avaient depuis longtemps établis entre eux et jusque dans les guerres, un système de relations qui faisait déjà de l’Europe un corps politique.
Tel était, selon Voltaire, l’état de l’Europe, non seulement dans son siècle, celui de l’Europe française aux temps des Lumières, mais à l’avènement de Louis XIV, en 1660.
Il écrivait dans les premières pages de son « Siècle de Louis XIV » :« Il y avait déjà longtemps (à l’avènement du Roi) qu’on pouvait regarder l’Europe chrétienne (à la Russie près) comme une espèce de grande république partagée en plusieurs Etats, les uns monarchiques, les autres mixtes, ceux-ci aristocratiques, ceux-là populaires, mais tous correspondant les uns avec les autres, tous ayant un même fond de religion, quoique divisés en plusieurs sectes, tous ayant les mêmes principes de droit politique et de politique, inconnus dans les autres parties du monde. C’est par ces principes que les nations européennes ne font pas esclaves leurs prisonniers, qu’elles respectent les ambassadeurs de leurs ennemis, qu’elles conviennent ensemble de la prééminence et de quelques droits de certains princes, comme de l’empereur, des rois et des autres moindres potentats et qu’elles s’accordent surtout dans la sage politique de tenir entre elles, autant qu’elles peuvent, une balance égale de pouvoir, employant sans cesse les négociations, même au milieu de la guerre et entretenant les unes chez les autres des ambassadeurs et des espions moins honorables qui peuvent avertir toutes les cours des desseins d’une seule, donner à la fois l’alarme à l’Europe et garantir les plus faibles des invasions que le plus fort est toujours prêt d’entreprendre » [1].
Si peu enclin qu’il fut à louer les mérites de la religion chrétienne, Voltaire n’hésitait pas à compter parmi les éléments constitutifs de l’Europe« un même fond de religion ».
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