Lundi 16 mai, les Français sont conduits à travailler. En effet, une loi votée fin juin 2004, a décidé de supprimer le lundi de Pentecôte de la liste des jours fériés. L'application de la loi se fait dans un gigantesque cafouillage.
1. Fête juive, préexistant à la fête chrétienne, la Pentecôte tient son nom au fait qu’elle se célébrait au 50ème jour (en grec : he pentèkostè) après la Pâque. Elle coïncidait avec la fête de la Moisson où, après les sept semaines que dure en moyenne la récolte, étaient offerts les premiers produits de la terre.
Elle était l’occasion d’un pèlerinage à Jérusalem.
2. La fête chrétienne est celle du cinquantième jour qui suit Pâques. Les premiers chrétiens n’accordèrent pas une grande attention à la Pentecôte comme telle. Ils célébraient Pâques, sommet de l’année liturgique, « grand dimanche » comme disait saint Athanase, pendant 49 jours. Pentecôte désignait la durée de ces 49 jours et non la fête du 50ème.
C’est au IVème que l’on se mit à célébrer le 50ème jour, marqué par le don de l’Esprit saint qui inaugure le temps de l’Eglise ouverte à tous les peuples, le temps du témoignage à réaliser dans le monde entier.
3. La date du dimanche de Pâques étant mobile, le jour de l’Ascension (40 jours après, un jeudi) l’est aussi, tout comme le dimanche de Pentecôte (50 jours après Pâques).
4. Les « fêtes d’obligation » sont, dans l’Eglise catholique, les fêtes où les chrétiens doivent participer à la célébration de la messe. Le lundi de Pentecôte, qui n’est pas une fête religieuse, n’en fait pas partie. La Pentecôte, étant un dimanche, constitue, elle, un jour à consacrer au Seigneur (l’expression dies dominica, jour du Seigneur, est à l’origine du mot dimanche).
5. C’est le 8 mars 1886 qu’une loi reconnaît comme fêtes légales chômées le lundi de Pâques et le lundi de Pentecôte. Charles Freyssinet est alors président du Conseil (c’est son troisième cabinet), Jean Sarrien est ministre de l’Intérieur et René Goblet ministre de l’Instruction publique, des Beaux-arts et des Cultes. Voir notre article« Les jours fériés en France », dans les Etudes sociales et syndicales 06 décembre 2004.
6. Par métonymie, le mot est pris pour désigner des plantes poussant à l’époque de la Pentecôte : variété d’iris en Normandie, chèvrefeuille dans l’Hérault, le Tarn, petite orchidée rose en Sologne, Centre, Poitou, Maine, Normandie, etc. La pivoine est quelquefois nommée la rose de la Pentecôte.
7. L’île de la Pentecôte se situe dans la partie nord de l’archipel de Vanuatu : 438 km2, 7.000 habitants.
8. Lundi 16 mai 2005 : gigantesque cafouillage dans l’application de la loi du 30 juin 2004 rétablissant le travail le lundi de Pentecôte. Cette loi vise à instaurer une journée de solidarité pour les personnes âgées et handicapées, après la canicule de l’été 2003 (où 15.000 personnes sont mortes). Un décret du 23 avril 2005 crée la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), destinée à gérer la contribution de 0,3 % des cotisations des employeurs et une participation des régimes obligatoires de base de l’assurance vieillesse. La contribution de 0,3 % devrait rapporter 2 milliards d’euros.
Cette loi, mal accueillie dans l’opinion publique (« retour de la corvée », « travail forcé »), s’annonce d’application difficile. Le 16 mai, toute la France ne sera pas au travail. Les appels à la grève se multiplient, quelques entreprises ou administrations offrent cette journée comme un jour férié, de nombreuses entreprises acceptent que les salariés prennent un jour de congé ou de RTT.
9. Les syndicats se mobilisent vent debout contre la suppression du lundi de Pentecôte. La CFTC, à l’origine du mouvement, a déposé un recours devant le Conseil d’Etat (qui a rejeté la requête en référé le 3 mai mais devra examiner la demande sur le fond plus tard) et devant la Cour européenne des droits de l’homme. Force ouvrière a aussi déposé un recours devant le Conseil d’Etat. La CFDT approuve cette démarche. La CGT aussi, qui cherche à utiliser la pagaille attendue dans les administrations et les entreprises pour prolonger les manifestations du 10 mars dernier et pour faire monter la pression sociale, à quelques jours du referendum du 29 mai sur le traité de constitution européenne.
10. Un Comité des Amis du Lundi, créé en novembre 2003, coordonne une grande partie des protestations, avec le soutien de plus de 110 députés (dont un nombre significatif appartient à la majorité parlementaire). Site internet :www.lesamisdulundi.com
Appuyé par la CFTC, ce Comité diffuse des communiqués toniques du genre « Le lundi de Pentecôte, continuez à effectuer vos pèlerinages. Nous avons identifié trois grands pèlerinages à la Pentecôte :
- Paris-Chartres pour les catholiques,
- le château de Presles pour Lutte ouvrière,
- l’ascension de la roche de Solutré pour les mitterrandiens ».
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