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Bernard Vivier et l'IST à l'honneur


Mardi 31 janvier dernier, dans les locaux du Palais d'Iéna, plus de 300 personnes étaient venues entourer Bernard Vivier. Celui-ci recevait des mains de Patrick de Carolis, président de France Télévisions, les insignes de chevalier de la Légion d'honneur, en présence de Jacques Dermagne, président du Conseil économique et social, et de André Bergeron, ancien secrétaire général de la CGT-Force ouvrière. Le décret de nomination honorant Bernard Vivier, directeur de l'Institut supérieur du travail, avait été établi au titre du ministère des relations du travail, le 25 mars 2005. On trouvera, ci-après de larges extraits des interventions prononcées et de la réponse de l'intéressé.


Mardi 31 janvier dernier, dans les locaux du Palais d’Iéna, plus de 300 personnes étaient venues entourer Bernard Vivier. Celui-ci recevait des mains de Patrick de Carolis, président de France Télévisions, les insignes de chevalier de la Légion d’honneur, en présence de Jacques Dermagne, président du Conseil économique et social, et de André Bergeron, ancien secrétaire général de la CGT-Force ouvrière.


Le décret de nomination honorant Bernard Vivier, directeur de l’Institut supérieur du travail, avait été établi au titre du ministère des relations du travail, le 25 mars 2005.


On trouvera, ci-après de larges extraits des interventions prononcées et de la réponse de l’intéressé.


1. L’intervention de M. Jacques Dermagne


(...) Cher Bernard Vivier, cette cérémonie ne pouvait, à l’évidence, se dérouler ailleurs qu’au Palais d’Iéna, tant votre investissement au sein de notre Assemblée, tout autant que votre engagement personnel dans la vie sociale et économique de notre pays sont unanimement reconnus ici (...).



Permettez-moi, avant de céder la parole à l’officiant, de saluer tout particulièrement la présence en nos murs de M. André Bergeron, qui fut - et demeure - une très grande voix de la vie économique et sociale de notre pays. Nous sommes nombreux dans cette maison à nous inspirer de son exemple, de son souci d’équilibre dans les relations sociales au travers du paritarisme, et de sa vision d’une société civile apaisée et constructive (...). Je voudrais également saluer un autre ami du Conseil économique et social, le Président Patrick de Carolis (...).


Cher Bernard Vivier, vous voilà donc bien entouré à l’occasion de cette cérémonie qui, quoi qu’on en dise, demeure bien un événement dans une vie professionnelle et syndicale, en ce qu’il permet une reconnaissance officielle du travail accompli pour la collectivité (...).


2. L’intervention de M. André Bergeron


(...) Dans le contexte politico-syndical des années d’après-guerre, les organisations patronales et la majorité des syndicats ont un jour décidé de gérer ensemble ce qu’ils avaient créé par contrat collectif, l’assurance-chômage et les caisses de retraite complémentaires notamment.


C’est ainsi qu’est né le paritarisme qui aujourd’hui connaît les difficultés que l’on sait. Elles sont une des conséquences de la modification du rapport des forces industrielles dans le monde. Le livre d’Alain Peyrefitte « Quand la Chine s’éveillera » était, de ce point de vue, prémonitoire.


Le mouvement syndical, comme les organisations patronales, est représenté dans une multitude d’endroits comme, par exemple, le Conseil économique et social dont vous souhaitez - à juste titre - Monsieur le Président, qu’on tienne davantage compte des avis de haute qualité qui y sont rédigés.


Pour assumer toutes ces responsabilités, il faut, naturellement, des femmes et des hommes nantis d’un minimum de formation.


C’est la raison pour laquelle j’apprécie beaucoup l’action menée par l’Institut supérieur du travail que dirige avec compétence et dévouement mon ami Bernard Vivier. C’est pourquoi je suis très heureux qu’il soit aujourd’hui honoré.


Bernard Vivier m’a souvent invité comme conférencier à participer à ses stages lorsque j’étais secrétaire général de Force ouvrière.


C’est encore le cas aujourd’hui. La dernière fois c’était à Pau.


J’ai toujours été impressionné par le désir des participants de connaître l’histoire du mouvement ouvrier et notamment d’apprendre qu’il a fallu cinquante ans pour réconcilier le syndicalisme et la République. C’est un des prolongements de l’épouvantable drame de la Commune de Paris.


Cela explique pourquoi, après le vote de la loi Waldeck-Rousseau sur les associations, les militants hésitèrent longtemps à déposer la liste des responsables dans les mairies de peur d’être « fichés ».



Lorsque j’ai adhéré au syndicat typographique belfortain - en avril 1936 - les vieux militants ont commencé par me dire : « Tu fais d’abord bien ton travail et après tu demanderas ce que tu voudras ».

Et ils ont ajouté - dans le contexte de cette époque - alors qu’on a cru un instant à l’avènement des temps nouveaux, qu’il ne fallait jamais mentir aux ouvriers, c’est-à-dire se laisser glisser dans la voie de la démagogie, c’est-à-dire du mensonge (...).


3. L’intervention de M. Patrick de Carolis


(...). Le philosophe André Chouraqui nous apprend que "Chaque homme est compris dans l’enfant qu’il fut jadis". Pour bien te connaître, il faut donc remonter à la source de ton enfance : l’Aveyron, Millau où tu es né, au cœur des Grands Causses, au cœur de ces vastes espaces que tu affectionnes tant et qui forgent le caractère.


Dans la famille Vivier, quand on est gantier de père en fils depuis le Second Empire, le choix d’un métier ne se pose pas. Sauf - et c’est le cas - quand le métier disparaît et qu’il faut se préparer, loin de chez soi, à un autre avenir.


C’est donc à Paris, à 17 ans, que tu entames tes études supérieures, à la Faculté libre d’économie et de droit, la FACO. C’est là qu’au contact de tes maîtres, se définit ta passion pour les questions sociales et pour le journalisme. A l’occasion d’un stage dans un hebdomadaire économique, en 1975, tu signes tes deux premiers articles, l’un sur " les inconnues de la retraite ", l’autre sur " le chômage des jeunes ". Ces titres et leur contenu, qui 30 ans après demeurent d’actualité, révèlent déjà ta vocation.


Ton itinéraire professionnel est désormais tracé : celui d’un homme d’information et de communication. Un homme de conviction et d’engagement aussi (...).


Ce métier de journaliste, mon cher Bernard, c’est notre passion commune.


Tu sais, mieux que quiconque, combien est grande notre responsabilité sociale, Tu sais aussi qu’il existe deux sortes de journalistes : ceux qui pensent que la question est plus importante que la réponse et les autres dont tu fais partie (...). Tu sais, toi Bernard, que le chemin de la vérité passe, aussi, par l’écoute de l’autre. Tu as conscience que diffuser ou imprimer trop vite un élément partiel de cette vérité, c’est prendre le risque que cet élément soit interprété comme étant, à lui seul, toute la vérité. Or, les nouvelles technologies, qui accélèrent et facilitent les échanges, réduisent dangereusement le temps de la réflexion. La vitesse est source d’erreur et rien ne se fait de vrai sans la durée. Le courage, aujourd’hui, serait peut-être de ne pas subir le diktat du temps (la loi du temps). Nous savons tous qu’il existe un décalage entre l’idéal d’information et la réalité. L’objectif n’est pas de dénoncer en permanence ce décalage mais de le réduire.


Mon cher Bernard, tu t’y emploies avec succès.


Tu n’as pas 30 ans quand tu rejoins en 1984 l’Institut supérieur du travail comme journaliste et directeur des études. Tu en es aujourd’hui le directeur.


Travailleur acharné, tu assistes depuis plus de 25 ans à tous les congrès de toutes les confédérations syndicales. Tu peux rédiger en trois mois un numéro spécial de cinq millions de signes sur les syndicats en France pour le quotidien "Liaisons sociales".


Ton parcours fait de toi un expert reconnu, consulté par de nombreux chercheurs, écrivains, journalistes, acteurs de la vie sociale et politique. Ton sens du contact, ton ouverture d’esprit, ton humour aussi, alliés à la sûreté de ton jugement, à ton attachement aux valeurs d’une société libre, ouverte et tolérante, te donnent de nombreux amis et relations dans les milieux les plus divers de la société.


On le voit : ta vie professionnelle est largement remplie. Mais cela ne te suffit pas. Tes autres activités recouvrent des domaines fort variés.



  • Dans le domaine de l’éducation, par exemple, te voilà aujourd’hui vice-président de la Faculté Libre de Droit, d’Economie et de Gestion de Paris, la FACO, où tu fus naguère étudiant. Tu y pilotes, notamment, le développement d’une école...de journalisme !

  • Autre terrain d’action : celui de la CFTC. Ce n’est pas le moindre et nous savons qu’il te tient particulièrement à coeur.


Secrétaire général puis président du syndicat national des journalistes, tu conduis le développement de la CFTC dans un milieu où tout n’est pas facile pour elle. En neuf ans, ton syndicat passe ainsi de 4 % à 11,5 % des voix aux élections professionnelles nationales des journalistes.


Aujourd’hui vice-président confédéral, tu sièges, au titre de la CFTC, au Conseil économique et social qui nous accueille aujourd’hui. Tu es membre de la section du travail et tu as présenté en 2003 un rapport justement sur « la place du travail ».


(...) Aujourd’hui c’est donc, ton itinéraire, ton éthique professionnelle, tes travaux et ton engagement pour un syndicalisme authentique qui sont pleinement récompensés par la République, en t’élevant au grade de chevalier dans l’ordre de la Légion d’Honneur.


M. Patrick de Carolis remet les insignes au récipiendaire :" Bernard Vivier, au nom du Président de la République française et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous faisons chevalier dans l’Ordre national de la Légion d’Honneur".


4. L’intervention de M. Bernard Vivier


Plus que jamais, nous avons besoin d’hommes et de femmes engagés.


Pendant de longues années en France, en Europe et dans le monde, nous n’avons pas pu concevoir la vie politique et sociale autrement que par des logiques d’affrontement et d’opposition.


Il fallait obligatoirement être d’un camp : libéral ou marxiste, à droite ou à gauche, à l’Est ou à l’Ouest, pour les patrons ou pour les ouvriers. Tout pour la barricade ou le mur de Berlin !


La recherche de l’équilibre social était, dans le monde syndical, affaire suspecte. Résoudre les inévitables conflits du travail par la négociation plus que par la grève relevait de la trahison de classe, au mieux de l’inconscience puérile.


L’Institut supérieur du travail, créé en juin 1969, quelques mois après la vague de mai 1968, ne pouvait échapper, de par la nature de ses activités, à ce choc des idéologies.


Longtemps, j’aurais pu redouter le moment présent, celui qui me fait ce soir me retrouver avec vous qui représentez les milieux très différents dans lesquels il m’a été donné d’œuvrer.


La vie m’a, en effet, conduit à côtoyer tout à la fois des chefs d’entreprise et des syndicalistes, des réformistes et des révolutionnaires, des chrétiens et des athées militants. Et à me sentir à l’aise dans une action professionnelle ou associative diversifiée. Vouloir cheminer sur une ligne de crête exposait aux sanctions : trop proche des patrons pour les révolutionnaires, trop sensible au mouvement ouvrier pour les bourgeois et trop proche d’un extrême pour les esprits tordus !


Fort heureusement, les temps changent, qui permettent désormais de mieux aller à l’essentiel de ce que nous avons à faire, c’est-à-dire, pour l’équipe de l’Institut supérieur du travail, diffuser une culture apaisée et moderne des relations sociales :

en faisant comprendre le fait syndical, son utilité, sa place dans la construction sociale du pays. Entre gouvernants et gouvernés, la représentation collective est nécessaire. L’Etat ne peut pas tout, ne doit pas tout faire ;

en aidant les militants et représentants du personnel à ancrer leur démarche dans une action syndicale authentiquement professionnelle, qui sache se détacher de toute emprise politique ;

en soulignant les vertus de l’action réformiste, du contrat collectif, du meilleur compromis possible. Les grandes avancées sociales, celles qui durent, sont le résultat de la négociation.


Je voudrais dire ici ma reconnaissance à ceux qui, bien avant moi, ont permis la création et le développement de cet Institut et à tous ceux qui, dans l’équipe actuelle, administrateurs, intervenants, poursuivent l’action.


Si la société française reste encore terriblement duale et divisée, des avancées se font. L’ouverture européenne va considérablement accélérer l’évolution des esprits et, à l’instar de ce qu’a vécu l’Espagne en quelques années, faire entrer la France dans la culture du dialogue, voire du consensus.


De ces années passées, je retiens la diversité des engagements et des itinéraires personnels chez tous ceux dont j’ai croisé le chemin. Tout cela est pour moi source d’un véritable enrichissement (...).


(...) S’agissant de ma sensibilité personnelle, et alors que vous savez le soin que je mets à l’Institut supérieur du travail à préserver l’éventail des sensibilités, bon nombre d’entre vous connaissent mon attachement à l’humanisme chrétien. J’y suis d’autant plus attaché que cet humanisme permet de dialoguer respectueusement avec tous ceux qui ne vivent pas la même foi. La conviction n’est pas l’ennemie de l’ouverture (...).

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