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Photo du rédacteurBernard Vivier

Bernard Thibault dans le Who's who : et alors ?

Bernard Thibault entre dans le Who's who. Serait-ce un signe de l'embourgeoisement du secrétaire général de la CGT ? L'annonce d'une évolution réformiste qui ferait se côtoyer le leader de la CGT et les grands de la finance en France ? Rien de tout cela. Loin des spéculations, il s'agit là d'un « non-évènement ». Les précédents le montrent.


A l’approche et au cours du dernier congrès de la CGT, en décembre 2009, les critiques à l’encontre de Bernard Thibault ont été nombreuses. Motif : à trop fréquenter Nicolas Sarkozy et à amorcer une relation avec le patronat qui n’exclut plus la négociation et le compromis, le secrétaire général de la CGT en aurait oublié son devoir de militant révolutionnaire et aurait déserté les contacts avec la base de la CGT. Le 17 août précédent, au micro de France info, Xavier Mathieu, le leader CGT de Continental à Clairoix dans l’Oise, entreprise alors en plein conflit, lance : « Les Thibault et compagnie, c’est juste bon qu’à frayer avec le gouvernement, à calmer les bases. Ils servent juste qu’à ça, toute cette racaille ».


La critique, relayée par les milieux syndicaux proches du trotskisme (Lutte ouvrière essentiellement) est aussi violente que fausse et injuste.


Fausse, parce que, à l’approche de son congrès confédéral, Bernard Thibault, loin de les négliger, a développé les contacts et les rencontres avec les équipes CGT dans les entreprises, les régions, les fédérations.


Injuste aussi, parce que le rôle du secrétaire général d’une organisation syndicale, quelle qu’elle soit, est bien de représenter les intérêts de ses mandants dans les lieux les plus divers et les plus élevés où s’exerce le pouvoir économique, social et politique. Y compris donc à l’Elysée.


Le débat de fond est ailleurs, qui porte sur l’effort que mène la CGT pour concilier contestation et syndicalisme de rupture d’une part, négociation et recherche de compromis de l’autre. Le congrès confédéral a souligné les difficultés de l’exercice et l’inévitable temps que peut prendre une telle évolution.


Mais le débat ne porte pas sur les fréquentations, naturelles et nécessaires, du secrétaire général de la Confédération.



Bernard Thibault, talon rouge ?

Pourtant, lors de l’édition 2010 du dictionnaire biographique Who’s who in France, des observations amusées voire narquoises ont aussi accompagné l’arrivée d’une notice sur Bernard Thibault. Eh quoi ! a-t-on entendu en substance, Thibault devient-il talon rouge, un de ces gentilhommes élégants du XVIIème siècle qui portaient à la Cour de hauts talons rouges ? Un homme caractérisé par « une courtoisie talons rouges », comme écrivait Louis Aragon dans Les Beaux quartiers ?


Parmi les 1084 nouvelles biographies de cet annuaire qui en compte quelque 22 000, la présence de Bernard Thibault n’a rien d’un évènement, même si, depuis dix ans, il avait décliné la proposition faite par l’éditeur (car on ne demande pas à entrer au Who’s who, on y est invité). L’édition 2010 accueille ainsi des personnalités diverses, allant du percussionniste Manu Katché à la première adjointe au maire de Paris, Anne Hidalgo, en passant par la secrétaire nationale des Verts, Cécile Duflot, l’évêque d’Angers, Emmanuel Delmas, le secrétaire général du SGEN-CFDT, Thierry Cadart, ou le PDG de la SNECMA, Philippe Petitcolin.


Figurant dans le dictionnaire, on trouve déjà Marie-George Buffet (entrée en 1997) et Arlette Laguiller (entrée en 1990). En revanche, parmi les trois Besancenot mentionnés (deux diplomates et un haut fonctionnaire), on ne trouve pas de dirigeant du NPA prénommé Olivier.


Côté syndical, les noms cités sont relativement peu nombreux. A l’évidence, certains ne tiennent pas à figurer dans l’annuaire. On pense notamment à Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière, organisation dont la tradition de distance à l’encontre de ce type de publicité est ici respectée (seul Hubert Bouchet est entré dans l’annuaire en 2000, comme secrétaire général des cadres Force ouvrière).

D’autres, comme Bernard Van Craeynest, président de la CFE-CGC, n’y sont pas, contre toute attente : oubli de l’éditeur ? refus personnel ? Un de ses prédécesseurs, Paul Marchelli, y figure depuis 1987.


Jacques Voisin, président de la CFTC a sa notice depuis 1996 et son prédécesseur Alain Deleu y est toujours.


A la CFDT, François Chérèque, secrétaire général, côtoie depuis 2002 son père Jacques Chérèque, entré en 1988. D’anciens responsables de la CFDT y sont aussi, entrés dans l’annuaire à l’époque de leurs responsabilités syndicales, comme Jacques Kheliff ou Marie-Odile Paulet.


A la CGT, Maryse Dumas et Jean-Christophe Le Duigou (depuis 2000) ou Didier Le Reste (depuis 2007) précèdent Bernard Thibault.


La présence de Bernard Thibault dans le Who’s who n’a donc rien d’un évènement



Ambroise Croizat, dirigeant communiste et syndical, ministre du travail de 1945 à 1947, est un personnage vénéré à la CGT. Une place a été inaugurée à Paris le 2 décembre 2009. De son vivant, son nom dans le Bottin mondain le situait aussi dans le beau monde.

Marcel Paul et le marquis du Paty de Clam

Pour terminer ce regard, rappelons que le Bottin mondain était jadis bien plus accueillant en direction de certains « révolutionnaires parvenus ». Cet annuaire, assez différent du Who’s who (qui s’intéresse beaucoup au monde des affaires et des personnes « reconnues pour leurs talents et leurs réalisations »), est bien davantage l’annuaire d’un certain savoir-vivre.


Dans l’éditorial de l’édition 1939, André de Fourquières définit le Bottin mondain comme « le guide du monde et de tous les mondes, le guide de l’élite, le guide de toutes les élites ». Dans cette même édition, on y trouve les noms de Jacques Duclos, Maurice Thorez ou Ambroise Croizat, dirigeants politiques d’importance du Parti communiste français, filiale de l’Internationale communiste.


La pratique a duré quelque temps. Dans l’édition 1948 du Bottin mondain, avec les trois noms déjà cités, se trouve aussi mentionné Marcel Paul, dans la même page que Joseph Paul-Boncour ou le marquis du Paty de Clam.


Quel chic, camarade communiste !



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