Au 49ème congrès confédéral, le 8 décembre, le trésorier de la CGT a donné lecture des comptes de la Confédération. La loi du 20 août 2008 fait obligation aux organisations syndicales de publier des comptes certifiés. Cette obligation va s'appliquer de manière progressive du niveau confédéral jusqu'au niveau du syndicat, avec des dérogations.
Seules seront obligées de publier leurs comptes les structures affichant un budget de plus de 230 000 €. La CGT, a affirmé Michel Doneddu, administrateur de la CGT (c’est-à-dire trésorier confédéral), a fait pression sur le ministère du travail pour que les décrets d’application retiennent ce seuil au lieu de celui de 153 000 euros initialement prévu. En pratique, les organisations affichant un budget de moins de 2000 euros annuels pourront se limiter à une comptabilité recettes-dépenses et en rendre compte à l’inspection du travail ou seulement la publier sur leur site internet. Ceci devrait concerner un bon nombre de syndicats d’entreprise. Entre 2000 et 230 000 euros, les organisations devront établir une comptabilité simplifiée, ce qui sera le cas de la plupart des unions départementales. Les fédérations et la confédération, dont le budget est supérieur à 230 000 euros, devront faire certifier leur comptabilité et la faire publier au journal officiel.
Les ressources de la CGT se décomposent en recettes internes : cotisations, ventes des publications, souscriptions, et en recettes externes : subventions publiques, financement du paritarisme, contribution de partenaires divers. Les comptes communiqués au congrès de Nantes sont ceux de la confédération tels qu’ils ressortent d’un exercice calculé globalement sur 3 ans, entre deux congrès, et ajusté année par année. Ils reflètent les comptes de 2008, comparés à ceux de 2007, les chiffres définitifs de 2009 n’étant, bien évidemment, pas encore disponibles. Le total des ressources de la CGT a représenté quelque 115 millions d’euros en 2008. Il s’agit là, soulignons-le, des comptes de la confédération. Les ressources des fédérations et des structures territoriales ne sont pas prises en compte.
Le contour nébuleux des recettes internes
La première difficulté pour interpréter les recettes internes de la CGT tient d’abord au périmètre comptable. Les 520 000 mandats des délégués au congrès correspondent à 520 221 syndiqués à jour de leurs cotisations. Pourtant, la CGT revendique 651 196 timbres FNI collectés, qui correspondent à la première cotisation mensuelle versée par toute personne adhérant à la CGT, payée à la confédération une fois par an lors d’une nouvelle adhésion ou d’un renouvellement d’adhésion. On signale aussi que trois fédérations déclarent devoir 16 000 timbres FNI à la confédération (pour plus de détails, lire l’article "Les effectifs de la CGT" du 2 décembre 2009).
De plus, le calcul du nombre de cotisants ne détermine qu’imparfaitement le montant des recettes internes à la CGT. Le montant moyen des cotisations dépend du statut de l’adhérent : salarié du premier collège, de l’encadrement, chômeur, retraité, etc.
CoGéTise à l’épreuve de son premier congrès
La CGT dispose depuis 2007 d’un système central informatique de gestion des cotisations : CoGéTise. Cette disposition financière avait fait l’objet de vifs débats lors du 48ème congrès de 2006 et n’avait été approuvée qu’à 66% des voix des délégués. Depuis cette date, les syndicats de base adressent les cotisations collectées à la confédération, qui les répartit vers les fédérations et les unions départementales : « Cogétise est devenu pour la quasi-totalité des syndicats un outil de solidarité financière sans précédent dans lequel les versements effectués constituent la base commune à partir de laquelle l’ensemble des organisations de la CGT est financée » affirme Eric Laffont, membre du conseil d’administration de Cogétise, qui précise que « jamais la CGT n’avait été en capacité d’avoir un niveau de connaissance de ses adhérents aussi précis... ».
La mise en œuvre de Cogétise a permis de faire passer le nombre moyen de timbres payés par chaque adhérent de 8,26 à 10,26 par an. La CGT a constaté une augmentation des niveaux de cotisation de 0,2% par an. Le montant moyen des cotisations apparaît cependant en deçà de 1% du salaire net moyen. Surtout, « la revalorisation des cotisations ne correspond pas à l’évolution des salaires réels », regrette Michel Doneddu, qui constate que les syndiqués retraités et chômeurs ont revalorisé de 2,5% leurs cotisations mais que les ouvriers, employés et cadres actifs se sont contentés de 0,3% à 0,4% ...
Le bilan des ressources internes revendiquées représente 82 millions d’euros. Les cotisations ont représenté 69,7 millions d’euros en 2007, 71, 7 millions d’euros en 2008 et s’élèvent à 40 millions d’euros pour les premiers mois de l’année 2009. La part des cotisations s’élèverait à 53% des ressources globales de la CGT, au niveau confédéral. Le reste des ressources internes provient des ventes de publications (NVO et Vie Nouvelle) pour 5, 7 millions d’euros et de souscriptions pour 500.000 euros. Le rapport affirme également de façon sibylline que « 7% des ressources sont constituées par des recettes internes correspondant à diverses prestations de la confédération aux autres organisations ».
La diversité des ressources externes
Selon les comptes de la CGT, 41% de ses ressources proviendraient de recettes externes, essentiellement des subventions publiques pour 10,7 millions d’euros. L’organisation du Congrès confédéral a d’ailleurs bénéficié d’une subvention de 60.000 euros du Conseil général de la Loire Atlantique. A ces sommes s’ajoutent 8,9 millions d’euros de remboursement des organismes paritaires, 5 millions d’euros provenant des remboursements des comités d’entreprise, 3,7 millions d’euros de publicité dans la presse CGT, 2,4 millions d’euros correspondant aux indemnités des membres du CES et des CESR, et 1,5 million aux remboursements des organismes mutualistes pour des « prestations conventionnelles ».
Des dépenses contenues mais un équilibre fragile
Côté dépenses, la CGT alloue 48% de son budget au frais de personnel (6,22 millions d’euros), 32% au fonctionnement (4,37 millions d’euros) et 20% aux frais de structure liés à l’immeuble confédéral (2,75 millions d’euros).
A ces dépenses s’ajoutent le budget du mensuel Ensemble, adressé à tous les syndiqués (1,9 millions d’euros) et la gestion du centre de formation confédérale Benoît Frachon (2,7 millions d’euros). Denis Baudequin, président de la commission financière et de contrôle, a rappelé que la CGT avait enregistré un déficit d’exploitation sur les trois exercices précédant le congrès 2006. Un plan de redressement sur trois ans avait donc été décidé par la direction confédérale. Il a permis de réaliser un exercice 2008 bénéficiaire.
Deux principes ont été mis en œuvre : « que toute dépense se décide au regard des moyens susceptibles d’être engagés », et qu’un ajustement des structures conduise à « contenir l’évolution de l’effectif salarié et le poids qu’il représente dans la structure budgétaire ».
Déplorant une diminution des recettes à cause de la baisse des subventions publiques et d’une hausse insuffisante des cotisations, la direction confédérale a souligné que le redressement de ses comptes est réel, mais « reste encore fragile ». Après un déficit cumulé de 279.000 euros en 2006 et 2007, l’exercice 2008 a permis de dégager un excédent de 54.000 euros.
Les réserves confédérales s’élèvent donc fin 2008 à 10,3 millions d’euros, soit 7,5 mois de dépenses.
Vers la transparence ?
Pour diffuser une pratique vertueuse de la gestion syndicale, la direction confédérale a prévu d’installer « une commission financière et de contrôle auprès de chaque direction syndicale » Un stage de formation est déployé pour les militants appelés à prendre cette responsabilité, « qui demande à être beaucoup plus utilisé qu’il ne l’a été jusqu’à présent ». Ce nouvel organe de contrôle permettra peut-être à terme d’éviter que le tassement des ressources de la CGT ne provienne « soit de la non-application de la règle du 1% (dans le calcul du montant de la cotisation NDLR), soit d’une rétention intervenue lors de la déclaration par le syndicat » selon Eric Laffont.
L’enjeu, pour la CGT, semble moins d’assurer la transparence sur ses comptes que de s’assurer d’une remontée conforme des cotisations collectées : sur 859 responsables syndicaux chargé d’utiliser Cogétise, seuls 127 se sont réellement inscrits auprès de la confédération à ce jour... Pour le reste du budget de la CGT, ni les détachements de personnel ni les subventions directement perçues des entreprises et des collectivités ne paraissent devoir figurer dans les comptes. Le débat du congrès sur le rapport financier est venu illustrer ce désintérêt pudique pour les réalités comptables : il a duré cinq minutes et n’a enregistré qu’une seule demande de prise de parole, qui portait sur la présentation et non sur les comptes en eux-mêmes. Puis il s’est soldé par un vote à main levée où l’unanimité aurait été totale sans une dizaine de votes contre, tous motivés par d’autres considérations.
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