La loi encourage les entreprises à ouvrir leur réseau aux partenaires sociaux. A elles d'en négocier au mieux les modalités d'accès.
A l’ère des blogs, les bons vieux panneaux d’affichage syndicaux sont en voie de ringardisation accélérée. Mais même si une loi de 2004 encourage les entreprises à laisser les partenaires sociaux accéder à leur Intranet et à leur messagerie, la plupart hésitent encore à sauter le pas. Leur crainte ? Etre débordées par le flot des communiqués et perdre ainsi tout contrôle sur leur contenu. Cette attitude de refus pur et simple est contre-productive. D’abord, parce que l’employeur ne dispose pas davantage d’un droit de regard avec les tracts papier. Ensuite, parce que c’est la porte ouverte à des méthodes plus gênantes. Rien n’empêche, en effet, une section syndicale d’ouvrir son propre site sur le Web et d’y publier le contenu de son choix. La section CFDT de la SSII Oracle s’exprime ainsi via un blog depuis qu’elle a été écartée de l’Intranet. En outre, les syndicats peuvent être tentés de passer en force en envoyant des e-mails aux salariés sans accord préalable, comme l’a fait la CFDT à la Sonacotra en 2003 (elle a d’ailleurs été condamnée) ou la CFTC chez Microsoft en 2004.
Copie à la DRH
Dès lors, il est plus raisonnable de négocier un accès sous contrôle à l’Intranet et à la messagerie interne. Il est possible notamment d’accorder à chaque organisation syndicale - par exemple, pour une durée déterminée, à titre d’essai - l’équivalent d’un panneau d’affichage électronique. C’est ce qu’a fait La Poste. D’autres entreprises vont plus loin en permettant aux salariés qui le souhaitent de s’abonner aux listes de diffusion proposées par chaque syndicat. Microsoft France a finalement signé en 2004 un accord de ce type avec ses partenaires sociaux, dans lequel il est prévu que le DRH reçoive une copie de chaque message. Les syndicats du géant de l’informatique sont de surcroît autorisés à envoyer deux e-mails par an à tous les salariés afin de leur rappeler leur présence sur l’Intranet.

Confidentialité garantie
Une autre solution est bien sûr possible : laisser aux organisations syndicales un accès libre et permanent à la messagerie interne. C’est l’option retenue par le voyagiste Nouvelles Frontières (lire encadré ci-dessus). Mais rares sont encore les entreprises qui ont choisi d’ouvrir complètement les vannes. Dans tous les cas, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) indique qu’il faut permettre aux salariés de s’opposer à la réception de messages syndicaux et rappeler cette possibilité systématiquement dans chaque e-mail. Enfin, la confidentialité des consultations doit être garantie aux salariés, afin que l’entreprise ne puisse être soupçonnée de s’informer sur leurs opinions en fouillant dans les serveurs informatiques.
(article paru dans Management mai 2006)
Liberté totale chez Nouvelles Frontières
L’accord signé chez le voyagiste en 2004 est quasiment unique : les trois organisations syndicales représentatives ont le droit de diffuser des e-mails au 5400 salariés, sur leur adresse professionnelle, sans limitation ni contrôle. Même les pièces jointes sont admises et chacun a le droit de répondre. Pour autant, le réseau n’est pas menacé d’engorgement, car les syndicats n’abusent pas de leur privilège : chaque section envoie environ quinze e-mails par an. Et les tracts papier ont disparu !
A lire aussi dans lesEtudes sociales et syndicales : « Les syndicats montent en ligne »22 février 2001 "L’entreprise et les messages électroniques des salariés"14 octobre 2001
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